Article d’opinion : Le projet de loi 88 doit être renforcé pour mieux protéger le droit à la vie privée des travailleurs

Pour nombre d’entre nous, la pandémie a changé notre façon de travailler, brouillant la distinction qui existait auparavant entre le foyer et le bureau.

Il s’agit là d’un changement radical, et nous ne sommes pas près de faire marche arrière. Selon un sondage mené récemment par Ipsos, pas plus de la moitié des Canadiennes et des Canadiens qui travaillent actuellement à domicile s’attendent à retourner au bureau régulièrement en 2022.

L’adoption du télétravail fait en sorte que les employeurs cherchent de nouveaux moyens de superviser leurs employés et de mesurer leur rendement. Toutefois, l’utilisation d’outils tels que les logiciels de suivi de la productivité peut porter énormément atteinte à la vie privée.

Avec le projet de loi 88, le gouvernement a fait un premier pas louable en apportant une plus grande transparence en la matière. S’il est adopté, les employeurs devront faire savoir à leurs employés s’ils font l’objet d’une surveillance électronique, comment et dans quelles circonstances.

S’il est bien de dire aux travailleurs qu’ils sont surveillés, la surveillance n’est pas nécessairement une bonne chose.

Du point de vue de la vie privée, la loi proposée est insuffisante. Les méthodes de surveillance du lieu de travail ne doivent être utilisées qu’à des fins justes et appropriées, et uniquement dans la mesure où elles sont raisonnablement nécessaires pour gérer la relation employeur-employé.

Les logiciels de surveillance des employés, que l’on appelle parfois « patrongiciels », sont dotés de fonctionnalités très évoluées. Ils peuvent surveiller nos frappes au clavier et l’utilisation de la souris, nos courriels et nos appels vidéo. Ils peuvent même analyser nos expressions faciales, pour interpréter, et parfois influencer, nos émotions et comportements.

Ces logiciels peuvent également suivre les mouvements et les activités des employés à distance par des outils tels que la géolocalisation, la télématique, la technologie prêt-à-porter, des applications numériques de santé et des logiciels de pointage biométriques.

On se croirait dans une dystopie de science-fiction. Des choses qui nous semblaient impossibles apparaissent sur les lieux de travail, ce qui soulève de graves inquiétudes quant au peu de protection accordée à la vie privée des employés en Ontario.

La surveillance électronique en milieu de travail devrait être régie par une loi ontarienne plus complète sur la protection de la vie privée dans le secteur privé, semblable à celle que le gouvernement a proposée l’an dernier dans son livre blanc audacieux sur la modernisation de la protection de la vie privée en Ontario.

Les employés devraient pouvoir porter plainte lorsque leur employeur ne respecte pas les politiques de surveillance de leur lieu de travail, et avoir un recours s’ils sont indûment lésés par ces politiques.

Ils devraient pouvoir contester les politiques trop envahissantes et les faire examiner par un organisme de réglementation indépendant ayant le pouvoir d’encourager ou d’imposer un changement de cap. Cette mesure est particulièrement importante pour garantir que les employeurs respectent la vie privée des travailleurs et cessent de les surveiller après qu’ils se sont déconnectés de leur travail.

Certains de ces mécanismes pourraient peut-être figurer dans les règlements qui seront pris en application de la loi 88, mais bon nombre d’entre eux devraient être prévus dans une loi autonome sur la protection de la vie privée dans le secteur privé, dont les travailleurs ontariens ont besoin et qu’ils méritent.

Le télétravail ouvre de nouvelles perspectives passionnantes pour un meilleur équilibre entre vie professionnelle et vie privée, à condition qu’il n’envahisse pas nos vies et nos espaces privés. Dans ce nouvel univers, nous devons veiller à ce que les nouveaux lieux de travail, quels qu’ils soient, favorisent véritablement la transparence, la responsabilisation et la protection de la vie privée.

 

Patricia Kosseim est commissaire à l’information et à la protection de la vie privée de l’Ontario.

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