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S1-Épisode 5 : La confiance des patients au cœur de la santé virtuelle

L’info, ça compte

Grâce à l’adoption rapide des nouvelles technologies numériques, les patients peuvent désormais « rendre visite » à leur fournisseur de soins de santé par téléphone, par messagerie sécurisée et par vidéoconférence, selon leur préférence. Le Dr Duncan Rozario et la commissaire Kosseim discutent des considérations particulières en matière de protection de la vie privée et de sécurité qui s’appliquent aux soins de santé virtuels, et de ce que les fournisseurs et les patients doivent savoir lorsqu’ils communiquent par le biais de ces nouveaux outils numériques.

Remarques

Le Dr Duncan Rozario est chef du service de chirurgie à l’ Hôpital Trafalgar Memorial d’Oakville (Ontario). Il reçoit également des patients en consultation externe au North Oakville Medical Centre, où il utilise des outils numériques perfectionnés pour leurs fournir des soins virtuels.

 

Sujets abordés :

Établir des liens avec les patients [2:34]

Le rôle clé de la communication dans les soins de santé [3:55]

Conjuguer la vocation de la médecine et un intérêt marqué pour la technologie [5:05]

Tendances relatives à l’adoption de la technologie par les médecins en Ontario [6:10]

L’expérience du patient comme moteur de l’offre de soins de santé virtuels [7:09]

Proposer des options aux patients [9:45]

Les pièges de l’envoi de renseignements sensibles par courrier électronique non sécurisé [10:35]

Utiliser des portails pour les patients et des systèmes de messagerie sécurisée [13:10]

Ajouter une dimension visuelle avec des images et la vidéoconférence [15:04]

Adapter le canal de communication à la situation, au fournisseur et au patient [17:00]

Adoption des technologies par les patients et réactions de ceux-ci [18:10]

Accueil et intégration des patients [19:58]

Protéger les renseignements et choisir une solution de visite virtuelle éprouvée [21:05]

Communications entre fournisseurs de soins de santé; élimination des télécopieurs [23:35]

Prochaines étapes vers un système intégré et sécurisé de renseignements personnels sur la santé en Ontario [27:45]

Renforcer la confiance dans les soins de santé numériques [30:40]

 

Ressources

L’info, ça compte est un balado sur les gens, la protection de la vie privée et l’accès à l’information animé par Patricia Kosseim, commissaire à l’information et à la protection de la vie privée de l’Ontario. Nous discutons avec des personnes de tous les milieux des questions touchant l’accès à l’information et la protection de la vie privée qui les intéressent le plus.

Si vous avez aimé le balado, laissez-nous une note ou un commentaire.

Vous souhaitez en savoir plus sur un sujet qui concerne l’accès à l’information ou la protection de la vie privée, ou compter parmi nos invités? Envoyez-nous un gazouillis à @IPCinfoprivacy ou un courriel à @email.

Transcriptions

Patricia Kosseim :

Bonjour. Ici Patricia Kosseim, commissaire à l’information et à la protection de la vie privée de l’Ontario, et vous écoutez L’info, ça compte, un balado sur les gens, la protection de la vie privée et l’accès à l’information. Nous discutons avec des personnes de tous les milieux des questions concernant l’accès à l’information et la protection de la vie privée qui comptent le plus pour eux.

 

Chers auditeurs, merci de vous joindre à nous pour un autre épisode de L’info, ça compte. Aujourd’hui, nous parlons de soins de santé. De soins de santé virtuels, plus précisément, et pourquoi il est important de faire confiance à son fournisseur de soins de santé. C’est vraiment important. Nous savons tous que pour être en santé, il faut bien manger, faire de l’exercice et avoir un mode de vie sain, mais nous devons aussi chercher des fournisseurs de soins de santé, soit lorsque nous en avons besoin, soit une fois par année, pour notre bilan de santé annuel. Avant la COVID-19, ça voulait dire prendre rendez-vous avec son fournisseur de soins et se rendre à leur cabinet pour le rencontrer en personne. Évidemment, la pandémie a changé tout ça.

Depuis plus d’un an maintenant, beaucoup de fournisseurs de soins se tournent vers les plates-formes de messagerie électronique, la vidéoconférence et d’autres moyens de fournir des soins virtuels à leurs patients. Nous avons la très grande chance de vivre à une époque où ces technologies sont accessibles, mais nous savons qu’elles s’accompagnent de préoccupations concernant la sécurité et la protection de la vie privée. La gestion d’une pratique virtuelle comporte une tout autre dimension. Il faut choisir l’application ou la plate-forme qui convient parmi toutes celles qui sont offertes, assurer la protection contre le les utilisations commerciales en aval, choisir les bons paramètres de protection de la vie privée, obtenir le consentement éclairé des patients en ligne, et protéger les renseignements personnels sur la santé contre les cybermenaces. Ce sont là de tous nouveaux défis qu’il faut relever pour protéger les renseignements personnels sur la santé en ligne.

Notre invité aujourd’hui est sur les premières lignes de la révolution virtuelle dans le système de la santé. Le Dr Duncan Rozario est chef du service de chirurgie à l’Hôpital Trafalgar Memorial d’Oakville ici en Ontario. Il a aussi une clinique externe achalandée au North Oakville Medical Centre, où il utilise des outils numériques perfectionnés pour dispenser des soins virtuels à ses patients. Et, comme nous l’avons appris récemment, il est aussi passionné de technologie. Dr Rosario, bienvenue à ce balado.

Dr Duncan Rozario :

Merci beaucoup, madame Kosseim. C’est un honneur d’être invité.

PK :

Alors, Dr Rozario, pouvez-vous nous parler tout d’abord de la nature de votre pratique? J’aimerais particulièrement en savoir plus sur votre relation directe avec vos patients. Comment ça se passe au quotidien?

 

En général, une pratique en chirurgie générale nécessite de voir les patients au bureau. J’ai donc un bureau privé à l’extérieur de l’hôpital, mais je passe environ la moitié de mon temps à l’hôpital, aussi. Un chirurgien généraliste voit généralement des patients qui ont des problèmes abdominaux. Nous faisons donc des chirurgies de la vésicule biliaire, des opérations de hernies, des résections du gros intestin en cas de cancer. Nous gérons le cancer du sein. Mon rôle à l’hôpital consiste donc à travailler dans la salle d’opération, à traiter les patients qui ont besoin d’une opération d’urgence et à faire des coloscopies en clinique externe.

Je joue également un rôle administratif à titre de chef du service de chirurgie de notre hôpital.

PK :

Juste pour le bénéfice de nos auditeurs, vous êtes plus que le chirurgien avec la blouse, le masque et les gants qu’une personne verra une seule fois dans sa vie, peut-être même jamais si elle est inconsciente. Vous rencontrez vos patients avant la chirurgie et après la chirurgie, j’imagine, comme toute relation patient-médecin devrait se dérouler.

Dr :

Absolument, Patricia. La communication et la confiance sont une partie importante du développement d’une relation entre un médecin et un patient. Et aucun chirurgien n’opérerait un patient sans l’avoir vu d’abord, avoir fait une anamnèse appropriée, c’est-à-dire l’histoire de sa maladie, fait l’examen physique nécessaire et avoir obtenu son consentement pour une gestion chirurgicale ou non chirurgicale. Comme c’est le cas pour la plupart des chirurgiens, je rencontre les patients plusieurs fois avant une chirurgie. Si leur cas nécessite une gestion chirurgicale, nous faisons une chirurgie et bien sûr nous les rencontrons après la chirurgie pour nous assurer qu’ils guérissent bien, pour passer en revue les rapports de pathologie et organiser le suivi nécessaire. Alors, même pour un chirurgien, la chirurgie représente une petite partie du travail. Comme pour la plupart des professionnels de la santé, la communication est plus importante.

Les soins de santé reposent sur la communication, qui compte pour 80 % de ce que nous faisons dans le secteur de la santé.

PK :

Et nous allons parler de communication. Et plus particulièrement de votre intérêt pour la communication virtuelle avec vos patients. Vous semblez être un médecin d’avant-garde et avoir un savoir technologique. Est-ce que la technologie vous a toujours intéressé?

Dr :

Oui, Patricia. Je dois dire que je crois fermement que les problèmes de l’avenir ne seront pas réglés avec les solutions du passé. Après mes études secondaires, j’ai eu un choix à faire : technologie et informatique ou sciences de la santé. Ma famille m’a clairement fait savoir que je pouvais être un médecin qui s’intéressait à la technologie, mais qu’il serait difficile d’être un spécialiste en traitement de l’information qui fait des chirurgies comme à-côté. J’ai donc choisi une carrière en santé et je dois dire que je n’ai aucun regret. Pouvoir servir les gens dans le domaine de la santé est une chance inouïe et une source de satisfaction sans fin. Cela vous permet aussi d’appliquer vos propres intérêts au domaine.

Et oui, la technologie me passionne depuis longtemps. Et je l’utilise donc dans ma carrière en santé.

PK :

J’imagine que ce n’est pas typique de tous les médecins. Comment décririez-vous le taux d’adoption de la technologie chez les médecins, en général, en Ontario?

Dr :

Je dirais que les médecins sont semblables aux citoyens ordinaires et que l’adoption de la technologie, dans une grande mesure, suit la loi de Laplace-Gauss ou la courbe normale. On trouve la plupart des médecins au centre, et un petit nombre, 2 ou 3 % de médecins d’avant-garde qui adoptent rapidement et sont prêts à essayer, sans tarder, la chose la plus fantastique, la dernière chose qui vient de sortir. Ça dépend vraiment des intérêts et des habiletés de chacun. Nous avons besoin de tous les types. Nous avons besoin de personnes sceptiques. Nous avons besoin de personnes qui soulignent les défis que représente l’instauration de nouvelles technologies en santé, mais nous avons aussi besoin de ceux qui adoptent sans tarder les nouvelles technologies, qui échouent et recommencent sans cesse jusqu’à ce qu’ils réussissent. Et j’ose espérer que je suis un de ceux qui réussissent à l’occasion et qui n’échouent pas trop souvent.

PK :

Et qu’est-ce qui vous a incité à offrir des services de santé virtuels à vos patients? Est-ce que c’est la COVID-19 qui a provoqué cela? Ou est-ce que cela a commencé avant la pandémie?

Dr :

Patricia, cela a commencé il y a très longtemps. J’ai été engagé dans les programmes d’amélioration de la qualité de notre service pendant de nombreuses années et j’ai eu l’honneur de représenter notre hôpital au programme d’amélioration de la qualité des soins chirurgicaux en Ontario. Et il y a de nombreuses années, l’importance de l’expérience des patients, encore une fois, devait être bien comprise. Il fut un temps où les soins aux patients étaient primordiaux, quand j’ai fait ma formation, un temps où on nous enseignait et on disait aux patients que, peu importe si votre médecin est super gentil, peu importe si elle ou il a de bonnes dispositions, si elle ou il est poli, vous voulez simplement les meilleurs soins possibles. Et c’était cela les soins médicaux jadis. Mais au cours de dernières décennies, il est devenu très clair que cela était incorrect.

Il est devenu très clair que l’expérience des patients, qui comprend plus que les seuls soins, mais aussi comment les patients perçoivent leur expérience en santé, comment les soins sont fournis, les manières et la courtoisie des femmes et des hommes qui prodiguent les soins de santé, cette expérience a un effet sur les résultats. Il y a longtemps, cela m’a inspiré une réflexion : « Est-ce que nous offrons la meilleure expérience possible à nos patients? Ou est-ce que nous sommes motivés par les processus archaïques et les modèles de paiement qui exigent que les patients consultent leur médecin s’ils ont besoin de renouveler une prescription? Ou s’ils ont une question toute simple à poser, ou pour une interaction qui ne nécessite pas réellement une visite en personne? Pourquoi est-ce que c’est obligatoire? Parce que ça convient au médecin? À cause de la nature du modèle de paiement? Parce que la technologie ne le permet pas? »

Et c’est comme ça que j’en suis venu à m’intéresser grandement aux soins virtuels. Je dois dire que quand ma fille est partie pour l’université, une conversation vidéo avait un plus grand impact pour ma femme et moi qu’un appel téléphonique. Comme n’importe quel parent le sait, si vous pouvez voir le visage de vos enfants, vous avez une assez bonne idée de comment ils se sentent, s’ils sont heureux ou non. Avec le temps, j’ai fini par comprendre l’importance des renseignements supplémentaires qu’on peut tirer d’interactions vidéo et audio comparativement aux visites en personne. Comprenez-moi bien, Patricia, je pense que les patients doivent avoir le choix. Et je pense que nous devons offrir la bonne modalité de soin au bon patient au bon moment.

Cependant, si une chose est dure comme un clou, vous devez frapper dessus avec un marteau. Mais qu’en est-il si nous avons réellement des options? Qu’arriverait-il si on pouvait avoir des interactions téléphoniques, par vidéo, par messagerie sécurisée et en personne? Et si les médecins avaient un choix? Et si les patients avaient un choix et si on pouvait leur offrir la modalité de soin opportune au moment opportun.

PK :

C’est fascinant d’entendre votre point de vue sur ces questions. Et particulièrement de vous entendre en parler du point de vue des patients et de leurs besoins comme facteur primaire pour l’avenir des soins de santé. J’aimerais juste vous poser quelques questions au sujet de la messagerie, juste parler des principes de base. Bien sûr, le courriel demeure le mode de communication le plus facile de nos jours, particulièrement chez les Ontariennes et Ontariens plus âgés. Alors, que dites-vous à vos patients qui sont contrariés de ne pas pouvoir simplement communiquer par courriel? Et comment leur expliquez-vous que c’est généralement une mauvaise idée?

Dr :

Le problème c’est que les courriels sont fondamentalement un moyen risqué d’envoyer de l’information. C’est comme si vous aviez un document confidentiel à envoyer à un membre de votre famille à Victoria, en Colombie-Britannique, et que vous remettiez ce document à une femme ou un homme sur la rue en lui disant : « Faites suivre » jusqu’à ce qu’il parvienne au membre de votre famille à Victoria. C’est essentiellement comme ça que le courriel fonctionne. Le courriel suppose l’envoi de ce qu’on appelle un texte clair, c’est-à-dire que ce que vous tapez est lisible et transmis d’un ordinateur à un autre, jusqu’à ce qu’il arrive à destination. Et toute personne qui se trouve à l’un de ces ordinateurs peut simplement regarder votre courriel. Donc, si vous envoyez un message à votre ami pour le rencontrer pour un café jeudi à 17 h, sauf s’il y a des facteurs de sécurité qui vous empêchent de vous rencontrer en public, ça devrait aller.

Cependant, si vous envoyez des renseignements bancaires, des renseignements médicaux ou n’importe quel renseignement personnel, confidentiel ou privé, je crois qu’il est totalement inapproprié de le faire au moyen d’un mode de communication ouvert. C’est donc dire que soit vous donnez cette feuille de papier à un homme devant votre maison et vous lui demandez de la faire suivre, soit vous envoyez cette information par courriel. C’est simplement un reflet de la technologie. Donc, le courriel n’est pas un moyen sûr d’envoyer de l’information, mais il existe de nombreuses façons d’envoyer de l’information de façon sécuritaire. Une de ces façons c’est la messagerie sécurisée. Et si vous regardez les grands systèmes de santé intégrés aux États-Unis, Kaiser Permanente est une vaste organisation de gestion de la santé qui a une importante expérience des soins virtuels.

En 2018, 50 % des interactions avec leurs patients se faisaient virtuellement et 80 % de ces interactions se faisaient par messagerie sécurisée. Donc, dans les grands réseaux de santé intégrés, les fournisseurs de soins peuvent facilement prodiguer la moitié des soins requis virtuellement, et la messagerie sécurisée semble être le moyen le plus populaire de communiquer lorsqu’il s’agit de fournir des soins de santé virtuels.

PK:

Est-ce que c’est compliqué pour les patients?

Dr :

Étonnamment, c’est facile parce que la messagerie sécurisée suppose l’utilisation de ce qu’on appelle un portail de patients. Souvent, ça ressemble à un courriel, mais le message ne se déplace pas, sinon dans le même ordinateur. Et il y a des moyens encore plus sûrs de communiquer par messagerie sécurisée. Par exemple, il y a un concept appelé messagerie sécurisée de bout en bout, ce qui signifie que le message que vous envoyez se déplace, chiffré, vers un serveur situé dans un endroit canadien. Votre message reste chiffré dans ce serveur et se déplace, toujours chiffré, vers le destinataire. Le chiffrement de bout en bout signifie que personne, ni le fournisseur de services, ni même la police, absolument personne ne peut lire le message sauf le destinataire prévu.

Donc, nous avons le chiffrement, qui est très sûr. Nous l’utilisons pour nos opérations bancaires chaque jour. Nous l’utilisons pour un large éventail d’interactions commerciales et juridiques. Nous avons donc la technologie, mais parfois la solution n’est pas suffisante. Nous avons parfois besoin de processus, de flux opérationnels. Nous avons besoin des bons incitatifs. Il faut qu’on nous apprenne le bon et le mauvais moyen de communiquer. Heureusement, le bureau du CIPVP, votre bureau, fait un excellent travail lorsqu’il s’agit d’expliquer pourquoi la sécurité et la protection de la vie privée sont importantes en communication.

PK :

Vous avez mentionné plus tôt que le visuel est réellement important, une dimension supplémentaire. À part la messagerie sécurisée, qu’est-ce que vous utilisez? Ou que recommandez-vous aux médecins ou aux fournisseurs qui ont besoin d’une dimension visuelle par vidéoconférence ou autre? Premièrement, dans quels genres de situations diriez-vous que vous avez besoin de cette dimension vidéo? Et quels moyens recommandez-vous pour ajouter ce visuel à vos communications avec vos patients?

Dr :

L’aspect visuel peut se faire de deux façons : il peut se faire par l’envoi d’une image ou d’une photo avec message sécurisé ou au moyen d’une interaction vidéo. Et il existe des interactions vidéo sécurisées comme il existe des messageries sécurisées. Donc, si une personne utilise Skype ou une solution vidéo typique, ces solutions ne respectent généralement pas les règles de sécurité et de protection de la vie privée de l’Ontario ou du Canada. Mais il existe des systèmes vidéo médicaux. Il y en a beaucoup qui sont conçus au Canada en plus. Et ces systèmes vidéo médicaux permettent des interactions vidéo chiffrées du fournisseur au patient. Qui plus est, une telle interaction vidéo est étonnamment utile dans un certain nombre de situations. Je l’ai utilisée pour regarder des incisions afin d’évaluer la guérison après une chirurgie. J’ai utilisé les interactions vidéo pour regarder des masses ou des changements cutanés avant une chirurgie. Et parfois, qu’il s’agisse de communications précédant ou suivant une chirurgie ou encore une communication dans des spécialités, comme la pédiatrie ou la psychiatrie, la simple communication de mots ne donne pas tous les faits.

Lorsqu’un patient voit le fournisseur de services et que le fournisseur de services voit le patient, cela facilite parfois la communication. Cela aide parce que nous faisons appel à notre humanité. Cette communication nous permet d’utiliser les indices subtils que nous utilisons chaque fois que nous rencontrons des gens pour communiquer avec plus de compassion et plus efficacement. Ça dépend de la situation et du besoin clinique, mais ce doit fondamentalement être une question de choix. Ce doit être une question de choix entre le fournisseur et le patient, parce que nous essayons réellement de trouver le bon canal de communication avec le bon patient, au bon moment. Et parfois c’est une combinaison des trois, Patricia. Par exemple, avant d’opérer une patiente ou un patient, j’insiste toujours pour les voir en personne une fois pour qu’elle ou il puisse développer leur confiance dans la relation médecin-patient. Pour pouvoir les évaluer, les examiner attentivement avant la chirurgie, évaluer leur fragilité, évaluer leur compréhension des concepts médicaux et leur capacité à donner leur consentement.

Mais après une interaction en personne, souvent c’est suffisant, souvent après cela, les appels téléphoniques, les interactions vidéo et les messages sécurisés suffisent pour les autres interactions avant et après la chirurgie. Mais c’est toujours une question de choix et une question de besoin clinique.

PK :

Quelles ont été les réactions de vos patients à cette proposition jusqu’à maintenant? Est-ce qu’ils s’adaptent? Est-ce qu’ils s’ajustent aux nouvelles formes de communication? Sont-ils hésitants? Quelle a été leur réaction à ces technologies ou dans quelle mesure les ont-ils adoptées?

Dr :

J’ai vécu toute la gamme de réactions possibles. Comme dans le cas de la courbe normale, je dirais que la plupart des gens sont vraiment très heureux des choix virtuels, que ce soit la messagerie sécurisée, le téléphone ou la vidéo, et la plupart des gens les ont adoptés sans problème. Quelques-uns de mes premiers utilisateurs utilisent les interactions visuelles pour presque toutes les interactions qu’ils ont avec moi, parce qu’ils sont les premiers utilisateurs. C’est un cliché de dire que les patients plus âgés peuvent ne pas être à l’aise avec la technologie. Et je crois que ce n’est pas le cas. Dans le monde moderne de la haute vitesse à large bande, des iPads et des téléphones intelligents, j’ai eu de superbes expériences avec des patients de tous les groupes d’âge, mais chaque personne est différente.

Certaines personnes sont mal à l’aise avec la technologie virtuelle. Certains veulent voir leur médecin en personne, plus la technologie est compliquée. Alors, vous pouvez vous imaginer… les interactions téléphoniques supposent un flux opérationnel simple et une technologie simple. La messagerie sécurisée ajoute un peu de complexité à l’interaction et la vidéo en ajoute encore plus. Alors, plus l’interaction est complexe, plus une personne doit être à l’aise avec la technologie.

PK :

Est-ce que vous facilitez les choses pour vos patients? Peut-être pas pour les premiers utilisateurs. Avez-vous un manuel, donnez-vous des explications, passez-vous les étapes en revue pour leur montrer comme déployer ces applications ou utiliser ces plates-formes? Comme les aidez-vous à se familiariser et à devenir à l’aise avec la technologie?

Dr :

Il faut être à l’aise avec la technologie qu’on veut adopter, et chaque personne a besoin d’un enseignement différent. Je dirais que 90 % du crédit revient au personnel extraordinaire de mon bureau. Il y a dans notre site Web une section qui décrit comment utiliser les outils virtuels que nous offrons. Nous avons des guides d’utilisation pour faciliter les choses le plus possible. Bien sûr, nous avons aussi un téléphone et je suis souvent au bureau plutôt qu’à l’hôpital. Nous jugeons qu’il est utile de donner des choix et de fournir tous les moyens dont les patients pourraient avoir besoin pour optimiser leurs soins et leur expérience.

PK :

Donc, quand vous avez recours à des fournisseurs de services ou des plates-formes externes, vos patients doivent-ils accepter certaines conditions pour pouvoir utiliser ces plates-formes? Est-ce que vous êtes inquiet, en d’autres termes, de l’utilisation commerciale, en aval, des renseignements personnels sur la santé que certains de ces fournisseurs voudront intégrer quelque part dans la chaîne de communication?

Dr :

En fait, non, ça ne m’inquiète pas. Si j’utilisais Skype ou un système vidéo commercial, absolument, Patricia, je serais inquiet. Comme vous le savez, nous sommes actuellement plus ou moins dans une époque industrielle de surveillance, dans laquelle les grandes compagnies de technologie ont accès à beaucoup, beaucoup, de renseignements qui circulent dans Internet. Si nous utilisons la technologie dans le secteur de la santé, nous devons utiliser la bonne technologie et nous devons l’utiliser en toute sécurité. Et la plupart d’entre nous ne sont pas des professionnels de la technologie de l’information. Heureusement, le gouvernement de l’Ontario fait vraiment le travail pour nous, et Santé Ontario a des solutions qui ont été évaluées et les accrédite pour s’assurer qu’elles comportent des mesures appropriées de sécurité et de protection de la vie privée.

Les fournisseurs de soins et les patients n’ont pas besoin de faire ce travail. Et je me permets de rappeler aux fournisseurs de soins de santé de l’Ontario que le gouvernement a fait le gros travail au préalable et réglé les autorisations et les certifications. Je suggère d’aller à otn.ca, d’examiner les options confirmant que le gouvernement se conforme aux règlements modernes sur la sécurité et la protection de la vie privée, puis d’exercer la diligence appropriée. Évaluez les solutions, voyez ce qui vous convient, ce qui convient à votre bureau et à vos patients, puis allez-y. Je ne suggérerais pas aux fournisseurs de soins d’utiliser des solutions qui n’ont pas été évaluées par Santé Ontario.

PK :

Oui, je comprends qu’il y a beaucoup de solutions attestées. Je pense qu’il y en a une dizaine jusqu’à maintenant, et la liste s’allonge. Évidemment, une solution attestée ne garantit pas le respect des lois ou des règlements. Les dépositaires de renseignements sur la santé ont quand même du travail à faire et doivent s’assurer de se conformer à la loi et aux règlements, mais je comprends que vous voulez dire que les solutions attestées, du moins d’un point de vue technique, ont été vérifiées. Et c’est sûrement un bon point de départ. Jusqu’à maintenant, nous avons parlé des communications entre les fournisseurs de soins de santé et les patients, donc entre les médecins et les patients. Évidemment, il y a beaucoup de communications entre les fournisseurs de soins de santé eux-mêmes, dans le cadre de la prestation des soins. Comment ces plates-formes de messagerie ou d’autres facilitent-elles les communications entre fournisseurs de soins? Est-ce qu’il y a des problèmes d’interopérabilité? Ou les fournisseurs sont-ils très à l’aise d’utiliser la messagerie ou la vidéoconférence pour communiquer entre eux?

Dr :

Je suis un peu gêné de l’avouer, mais la majeure partie des communications entre fournisseurs ou entre bureaux se fait par télécopieur. Le télécopieur aurait dû être jeté aux oubliettes il y a longtemps, parce qu’il y a vraiment peu de moyens de s’assurer qu’une télécopie a été envoyée, et qu’elle a été envoyée au bon destinataire et au bon numéro. Le télécopieur a eu son heure de gloire dans les années 70 et 80, mais il est grand temps de le remplacer. Et vous avez raison. Les fournisseurs de soins peuvent communiquer avec leurs patients au moyen d’une messagerie sécurisée, et le même système devrait être utilisé pour permettre aux fournisseurs de communiquer entre eux. Parce que malheureusement, en plus du télécopieur, les fournisseurs de soins utilisent toute une série d’autres méthodes non sécurisées pour communiquer entre eux, dont les courriels non sécurisés et la messagerie texte, mais il existe d’autres solutions maintenant.

Alors, les mêmes solutions qui nous permettent de communiquer avec les patients permettent aux fournisseurs de communiquer entre eux. Comme vous le savez, nos médecins de famille envoient des demandes de consultation de patients à des spécialistes, et ceux-ci envoient souvent leurs notes de consultation aux médecins de famille. Ils s’envoient aussi des questions. Nous envoyons des demandes de radiographies, d’ultrasons. Nous envoyons des demandes de tests de laboratoire. Nous envoyons des résultats d’évaluations pathologiques. Il y a une multitude de renseignements personnels sur la santé qui circulent en Ontario, la plupart par télécopieur. Et toutes ces communications, et je ne fais pas de farce quand je dis toutes ces communications, pas 10 % ou 20 %, mais toutes ces communications entre bureaux et entre fournisseurs peuvent se faire très efficacement par messagerie sécurisée, comme cela a été démontré très clairement par les systèmes de santé intégrés aux États-Unis.

PK :

Je suis sûre que vous savez que les envois par télécopieur représentaient la vaste majorité des causes de divulgation de renseignements personnels sur la santé l’an dernier. Comme le démontrera mon rapport annuel dans une ou deux semaines seulement, c’est la même histoire qui se répète malheureusement encore cette année, alors que les envois par télécopieur sont la cause principale des divulgations de renseignements personnels sur la santé en Ontario. Vous et moi aimerions voir les télécopieurs retirés de la profession. Notre bureau, comme vous le savez, a récemment rendu publics des conseils sur la sécurité et la protection de la vie privée dans notre guide sur les soins de santé virtuels que vous avez sûrement eu la chance de consulter.

Je ne veux pas vous embarrasser, mais j’aimerais vous demander dans quelle mesure, selon vous, ces conseils peuvent être utiles, ou dans quelle mesure le sont-ils, pour les fournisseurs de soins de santé qui envisagent d’utiliser des modes de communication virtuels avec les patients ou avec d’autres fournisseurs de soins. Dans quelle mesure sont-ils pratiques et applicables dans les activités quotidiennes d’un médecin?

Dr :

J’ai trouvé qu’ils sont très bien écrits et très utiles. Les médecins n’ont vraiment pas le temps, ni la capacité, de lire en profondeur les règlements du gouvernement, d’étudier en détail les communications sécurisées et privées. Et heureusement, c’est ce qu’a fait votre bureau. Le document présente les règles qu’un dépositaire doit suivre. Il précise nos responsabilités en tant que médecins en plus de souligner les risques et les avantages des soins virtuels. La seule suggestion que je ferais c’est de penser aux prochaines étapes, c’est-à-dire comment le système de santé, et la province, peuvent en venir à adopter un système de messagerie intégré, moderne et sécurisé pour nous débarrasser du télécopieur tout en plaçant les patients au cœur des soins, en toute sécurité.

Une discussion entre toutes les parties prenantes. Donc, l’Ontario Medical Association, Santé Ontario, les patients et les citoyens de l’Ontario, le personnel infirmier. Fondamentalement, tous les fournisseurs de soins, les citoyens de l’Ontario, quiconque est touché par cela, doivent participer à l’élaboration d’un système intégré. Idéalement, Patricia, j’aimerais dire que la province de l’Ontario devrait avoir un système qui permet à chacun de communiquer avec les autres de façon sécurisée pour dispenser les soins de santé. C’est mon rêve de voir toute la province ayant la capacité de pouvoir communiquer en toute sécurité aux fins des soins de santé pour permettre à l’information d’être inscrite en toute sécurité dans les dossiers médicaux électroniques et de mettre les soins entre les mains des patients.

Je crois que les patients devraient avoir tous les renseignements dont ils ont besoin. Donc, que ce soit mes notes de consultation, que ce soit un rapport de pathologie suivant une chirurgie, que ce soit les résultats d’une radiographie, je crois que les patients devraient avoir un accès sécurisé à tous les renseignements personnels qui concernent leur santé. Et les professionnels de la santé qui traitent ces patients devraient avoir accès à ces renseignements aussi, avec le consentement des patients. Imaginez qu’un tel système existe à l’échelle de l’Ontario, imaginez l’efficacité avec laquelle les données se rendent là où elles doivent être, virtuellement et instantanément. Et l’époque actuelle où nous avons un arriéré de soins, chirurgicaux et non chirurgicaux, causés par la COVID-19, qui existait même avant la COVID-19.

Imaginez que nous pouvons accroître l’efficacité et la compassion du système de santé avec un système de communication intégré. Ça, c’est mon rêve, Patricia.

PK :

Nous avons du pain sur la planche. Vous savez qu’une de nos priorités, ou un de nos secteurs prioritaires c’est la confiance dans les soins de santé numériques, et la vision dont vous venez de parler, Duncan, repose justement sur la confiance. S’il n’y a pas de confiance, on peut difficilement imaginer comment les données vont se transmettre du patient au fournisseur. Pour terminer, j’aimerais vous poser quelques questions sur ce que vous considérez comme un des principaux défis à relever pour vraiment accroître la confiance dans la prestation de soins de santé numériques en Ontario. Qu’est-ce qu’il faudra pour combler ce manque de confiance et faire en sorte que les gens acceptent la vision dont vous venez de parler.

Dr :

La confiance est en fait une question importante, et vous avez tout à fait raison. Quand nous devenons médecins, en vertu du serment d’Hippocrate, nous avons juré de respecter le secret professionnel. C’est pourquoi lorsqu’ils nous rencontrent dans notre bureau, les patients sont disposés à nous livrer leurs secrets les plus profonds. Parce que pour traiter nos patients efficacement et en toute sécurité, nous devons connaître leur état de santé. Nous devons connaître leurs pratiques sanitaires, les médicaments qu’ils prennent et leurs comportements, et l’efficacité des soins découle d’une relation fondée sur la confiance entre le fournisseur et le patient. Du coup, si nous communiquons avec les patients par messagerie sécurisée ou d’autres méthodes virtuelles, si nous voulons que la confiance s’installe, nous devons démontrer à nos patients que la meilleure technologie disponible est sûre et qu’elle protège leur vie privée, leurs renseignements personnels.

Il est donc essentiel de les assurer que nos communications sont privées et sécurisées pour obtenir cette confiance, parce que s’il existe une relation de confiance, nos patients seront à l’aise de nous envoyer par messagerie des renseignements confidentiels et personnels sur leur santé. Et ils seront à l’aise de recevoir ces renseignements de nous également. Vous avez tout à fait raison de dire que la confiance est réellement essentielle à une bonne relation entre le fournisseur de soins et le patient. Et c’est vraiment ce que nous devons rechercher. Et cela nécessite la participation de tous les intervenants dans la discussion à mesure que nous élaborons ces solutions, parce que la clé c’est une discussion fondée sur la collaboration. C’est la compréhension et le respect du point de vue de chacun, des besoins des patients, des besoins des fournisseurs, des besoins de notre payeur unique, le gouvernement de l’Ontario, ou des autres ministères de la Santé des provinces et des territoires du Canada.

Il faut comprendre le pouvoir de la collaboration. Et quand vous collaborez avec compassion, en toute confiance, c’est là que la magie s’opère.

PK:

Merci infiniment, Dr Rozario. Ça ressemble à ce que nous faisons tous les jours, et essayer de mieux protéger la vie privée et de mieux protéger les communications qui contiennent des renseignements personnels sur la santé est primordial pour ce que vous faites lorsqu’il s’agit d’instaurer la confiance chez vos patients et de leur fournir les meilleurs soins possible. Je suis ravie de voir que nous sommes sur la même longueur d’onde, et nous travaillerons en étroite collaboration avec vous et de nombreux autres acteurs du secteur de la santé dans les années à venir pour faire progresser la confiance dans les soins de santé numériques en Ontario. Ce fut un honneur de vous recevoir à notre balado aujourd’hui. Merci encore une fois. Vous nous avez donné un aperçu intéressant de quelques-uns des avantages et des embûches que supposent les soins de santé virtuels, et de tout ce dont les fournisseurs de soins et les patients doivent se méfier lorsqu’ils s’apprêtent à relever ce nouveau défi numérique.

Mais surtout, vous nous avez rappelé le rôle crucial de la confiance dans la prestation efficace des soins et, en définitive, dans une bonne santé. Les auditeurs qui veulent en apprendre davantage sur l’accès aux soins de santé virtuels et la protection des renseignements personnels peuvent visiter notre site Web à ipc.on.ca. Vous pouvez également appeler à notre bureau pour obtenir de l’aide et des renseignements généraux sur les lois de l’Ontario régissant l’accès à l’information et la protection de la vie privée. Nous voici maintenant à la fin de notre épisode. Prenez bien soin de vous. À la prochaine.

Ici Patricia Kosseim, commissaire à l’information et à la protection de la vie privée de l’Ontario, et vous avez écouté L’info, ça compte. Si vous avez aimé ce balado, laissez-nous une note ou un commentaire. Si vous souhaitez en savoir plus sur un sujet qui concerne l’accès à l’information ou la protection de la vie privée dans un épisode futur, communiquez avec nous. Envoyez-nous un gazouillis à IPCinfoprivacy ou un courriel à @email. Merci d’avoir été des nôtres, et à bientôt pour d’autres conversations sur les gens, la protection de la vie privée et l’accès à l’information. Si ça compte pour vous, ça compte pour moi.

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