Message de fin d’année de la commissaire : La grande conjonction de la vie privée
On ne s’attendait vraiment pas à vivre une telle année.
En 2020, la COVID-19 a bouleversé notre vie personnelle et professionnelle. La pandémie a connu bien des revirements au cours de l’année, au fil des progrès rapides de la science, de la fluctuation des taux d’infection et des recommandations changeantes.
Les périodes difficiles comme celles que nous vivons portent avec elles des occasions de changement, voire d’épanouissement, en nous poussant à découvrir de nouveaux moyens de surmonter les embûches posées sur notre chemin.
J’ai consacré les six derniers mois à m’installer dans mes nouvelles fonctions de commissaire. J’ai appris, écouté, rencontré des gens et planifié.
J’ai beaucoup appris au sujet des lois ontariennes sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée, et sur les processus, le personnel et la culture du CIPVP. Je suis infiniment reconnaissante à l’équipe du CIPVP, qui m’a si chaleureusement accueillie, a facilité ma transition et a fait preuve d’une grande souplesse ainsi que d’un engagement indéfectible de demeurer au service de la population ontarienne tout au long d’une année sans précédent.
J’ai rencontré (virtuellement) des intervenants externes de différents secteurs, d’autres hauts fonctionnaires de l’Assemblée législative ainsi que d’autres commissaires à l’information et à la protection de la vie privée de l’ensemble du pays. Ces conversations m’ont permis d’élargir mes horizons, de faire connaissance avec des gens, d’entendre différents points de vue et de préparer le terrain pour nos futures initiatives.
À cette fin, j’ai constitué un comité consultatif d’éminents experts du domaine de la gouvernance des données afin d’orienter la sélection des priorités stratégiques qui seront les nôtres pour les cinq prochaines années. Nous sollicitons également le point de vue de tous les intervenants dans le cadre de notre processus de consultation publique, qui se déroule jusqu’au 22 janvier 2021, afin de cerner les questions touchant l’accès à l’information et la protection de la vie privée qui comptent le plus pour les Ontariennes et les Ontariens.
Pendant ce temps, des changements législatifs sans précédent se sont préparés, surtout à l’égard du secteur privé.
Contrairement à l’Alberta, à la Colombie-Britannique et au Québec, l’Ontario n’a jamais adopté de loi sur la protection de la vie privée s’appliquant au secteur privé. En Ontario, les activités des entreprises sont assujetties à une loi fédérale, la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques (LPRPDE).
Adoptée il y a 20 ans, la LPRPDE accuse son âge, n’est plus adaptée au progrès rapide des technologies numériques et se démarque des régimes d’application plus modernes adoptés dans d’autres collectivités publiques.
En août dernier, un mois seulement après le début de mon mandat, le gouvernement de l’Ontario a entamé un processus de consultation publique visant à déterminer s’il y a lieu d’adopter une loi ontarienne sur la protection de la vie privée dans le secteur privé.
Mon bureau a fait part de son point de vue sur ce que nous considérons comme étant les éléments clés d’une telle loi, préconisant une démarche qui vise à favoriser dans la province des innovations importantes tout en respectant les droits des Ontariennes et des Ontariens en matière de protection de la vie privée et en leur permettant de faire des choix éclairés.
Après cette période de consultation, le gouvernement fédéral a déposé la nouvelle Loi de 2020 sur la mise en œuvre de la Charte du numérique (projet de loi C-11) visant à moderniser le régime fédéral de protection de la vie privée dans le secteur privé à l’instar de l’Europe, de la Californie, et du Québec dans le cadre de son projet de loi 64.
Il s’agit d’une réforme importante qui, si elle se concrétise, renforcera effectivement certains aspects de la protection de la vie privée des consommateurs, ce qui sera avantageux pour l’ensemble de la population canadienne.
Cependant, je garde espoir que le gouvernement de l’Ontario continuera d’examiner sérieusement si les droits relatifs à la protection de la vie privée de la population ontarienne seraient mieux protégés par l’adoption d’une loi provinciale qui serait essentiellement semblable à la loi fédérale, mais irait plus loin que le projet de loi C‑11, et serait adaptée aux valeurs, aux réalités et à la culture de notre province.
Par exemple, une loi provinciale sur la protection de la vie privée dans le secteur privé pourrait prévoir une protection plus complète dans les secteurs où le gouvernement fédéral ne peut agir en raison de contraintes constitutionnelles, notamment du côté des employés des entreprises sous réglementation provinciale, et des activités des syndicats, des partis politiques, des organismes de bienfaisance, des associations professionnelles et d’autres organismes sans but lucratif.
Une loi ontarienne sur la protection de la vie privée dans le secteur privé serait mieux alignée sur la réalité des petites et moyennes entreprises (qui composent 98 % des entreprises ontariennes et comptent pour 30 % du produit intérieur brut de la province), en établissant un cadre réglementaire connexe et en adoptant une approche plus souple et proportionnelle en matière d’éducation, de conseils et d’application.
Une loi ontarienne serait également mieux intégrée dans les lois actuelles sur la protection de la vie privée touchant le secteur de la santé et le secteur public, afin que soit établi un régime de réglementation plus harmonieux pour des initiatives intersectorielles novatrices qui seraient propres à l’Ontario. Ces lois, qui s’appliqueraient toutes au même territoire, pourraient être établies avec soin pour clarifier les circonstances dans lesquelles une loi en complète une autre ou l’emporte sur les autres, et relèveraient d’un seul organisme de réglementation.
De plus, une loi ontarienne comblerait une lacune importante relativement aux populations vulnérables, dont les enfants, qui sont absentes du projet de loi C-11. L’Ontario dispose d’une excellente occasion de réglementer les aspects particuliers du consentement, d’établir un régime clair pour les mandataires spéciaux et de prévoir de nouvelles protections, s’il y a lieu, pour les personnes les plus vulnérables.
Certains redoutent qu’une loi ontarienne ne ferait que s’ajouter à la multitude de lois déjà en vigueur dans l’ensemble du pays, alourdissant le fardeau des entreprises présentes sur la scène interprovinciale et internationale, qui seraient tenues de s’y conformer.
Cependant, une loi ontarienne bien conçue pourrait au contraire être harmonisée avec le projet de loi C-11 pour que ces deux lois se complètent et que les entreprises à réglementation provinciale soient soustraites à l’application du régime fédéral. Un tel fédéralisme coopératif s’est révélé efficace au Québec, en Colombie-Britannique et en Alberta. Pourquoi en serait-il autrement avec la plus grande province canadienne?
Au moment où j’écris ces lignes, de nombreux amateurs d’astronomie attendent patiemment de pouvoir observer la « Grande conjonction » (également appelée « étoile de Noël »). Ils savent à quel point il sera merveilleux et stimulant de voir les deux plus grandes planètes du système solaire, Jupiter et Saturne, s’aligner presque parfaitement pour faire apparaître un vif éclat de lumière dans le ciel nocturne. C’est un phénomène céleste qui ne s’est pas produit depuis l’an 1226.
Une chose semblable pourrait également se produire dans le domaine de la protection de la vie privée. Si l’on alignait ainsi avec soin la nouvelle loi fédérale et une loi ontarienne essentiellement semblable, nous serions les témoins d’une éclatante convergence d’idées qui donnerait naissance à l’un des régimes de protection de la vie privée les plus modernes, souples, complets et efficaces au monde.
J’espère que nous n’aurons pas à attendre huit siècles pour que cela arrive, et que ce sera vraiment spectaculaire!
Je vous souhaite, à vous et à vos proches, bonheur, santé et sécurité à l’occasion des fêtes. Que 2021 nous réserve à tous des jours meilleurs.
Patricia
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